LES ORIGINES DES WOLOFS EN MAURITANIE



LES ORIGINES DES WOLOFS EN MAURITANIE
L'histoire, même légendaire, de la Mauritanie, ne remonte pas au-delà du Xeme siècle de notre ère. La tradition rapporte qu'à cette époque le pays compris entre le fleuve Sénégal et le nord de l'Adrar était occupé par un peuple qu'on présume noir; les Bafour. Au sud du fleuve, dans les pays sénégalais, vivait le peuple socé. Le siège du groupement bafour était dans l'Adrar. L'Azougui actuel, à 15 kilomètres au nord-ouest d'Atar, en était la capitale ; la province qui en ressortis sait s'étendait entre les villes actuelles d'Atar et d'Oujeft, et était la plus florissante de l'empire. Les villes principales étaient, outre Azougui, qui portait jadis le nom de « Ville des Chiens » (Mcdinal al-Klab), mais dont on ignore le nom le plus ancien, celui des Bafour, Fouicht et Ntourfin près d'Oujeft ; lu Tinilel près d'Atar. Ces dénominations à forme arabo-berbère sont les appellations actuelles de puits et n'étaient vraisemblablement pas celles dont usaient les Bafour. On trouve, dans les parages de ces points d'eau, des traces de murs, des amas de pierres travaillées et des débris divers de construction et d'ancien habitat. La tradition rapporte très nettement que les campements noirs atteignaient le Tijirit. Enfin, on trouve encore aujourd'hui dans l'Aoukar des débris de canaris sur lesquels on reconnaît parfaitement des marques et dessins des peuplades noires sénégalaises. A Tin Daouia, on a même trouvé dans le sable un canari fort bien conservé.
C'est chez les Sarakollés que s'est le mieux perpétué le souvenir de leur ancienne domination dans le Tagant. Ils étaient alors connus sous le nom de Gangaris et ils ont conservé cette dénomination à ceux des clans et des familles qui ont dû régresser vers le Sud, sous la pression maure. Leurs anciens, villages du Tagant leur sont encore très connus de nom et de fait. Ils en montrent eux-mêmes les vestiges nombreux et très reconnaissables et en citent les noms : Oulo, Diabou, Babou, Nguikon, Nijdid. D'ailleurs ces Gangaris fie l'Assaba ont conservé des mœurs qui diffèrent de celles de leurs cousins Sarakollés du Sud et se rapprochent des usages montagnards, que leurs pères avaient jadis dans le Tagant.
La région trarza qui fait l'objet spécial de cette étude était une province de cette collectivité noire bafour : le nom de ce peuple est connu de plusieurs lettrés de la région ; il revit dans une tradition concernant un puits aujourd'hui disparu et qui se trouvait au sud de Khroufa. Il portait chez les Berbères le nom d'Inda Bafour, ce qui signifie, dit M'hammed Youra, qui rapporte la tradition, « le puits « des Beni Bafour. C'était un puits dont le forage remonte « à des temps très anciens. Il se produisit là, (par la suite), « une rencontre entre les Beni Dîman (Oulad Dîman) et les « Beni Yaqoub (Id Eïqoub). Les Beni Dîman furent mis en « déroute ; il n'y eut dans ce combat que des blessés et des « contusionnés. »
L'empire bafour, si l'on peut désigner ainsi le peuple noir qui vivait dans l'indépendance semi-anarchique des sociétés devait s'écrouler sous la poussée des tribus berbères-çanhadja. Les Lemtouna, qui venaient du versant sud de l'Atlas marocain, et qui depuis plusieurs générations étaient en lutte avec les Bafour, finirent par l'emporter.
Une de leurs invasions sous la conduite d'un chef dont on ne connaît que le nom islamisé : Abou Bekr ben Omar, et qui descendait de Tilagaguin fils d'Ourtentak, émir des Lemtouna, chassa définitivement les Bafour de leur pays.
(XIe siècle). La légende maure rapporte que le seul chérif qui accompagnait la méhalla berbère, Hadrami, voulut contribuer pour sa part à l'écrasement des infidèles. Comme les Bafour avaient des bandes de chiens dressés à la guerre, qui étaient aussi dangereux que leurs soldats (et c'est ce qui avait fait donner à leur capitale le nom de « ville des chiens ») le Chérif offrit à Abou Bekr ben Omar de dompter pour son compte soit les chiens soit les soldats ennemis. Le chef berbère, qui ne craignait pas les noirs, lui donna les chiens à vaincre. Et aussitôt le Chérif, entrant dans la ville, le chapelet à la main, vit venir à lui tous les chiens qui se couchaient à ses pieds. Pendant ce temps, les guerriers berbères et bafour se heurtaient dans la campagne. Chérif Ha-drami fut enterré dans la ville même. On montre encore son tombeau à Azougui.
Fuyant devant l'envahisseur, les Bafour descendirent vers le fleuve Sénégal, le traversèrent, et refoulèrent à leur tour vers le sud les peules socés des actuelles provinces du Diolof et du Cayor (Xie siècle).
La tradition rapporte que la fille du roi ou d'un roi du Bafour avait été faite prisonnière dans les luttes contre les Lemtouna. Par la suite, son père demanda à la racheter, ce à quoi l'émir Lemtouna consentit sans difficulté. A son arrivée au sud du fleuve, il se trouva qu'elle était enceinte des œuvres d'un des vainqueurs, dont il ne fut pas possible de connaître le nom. Elle accoucha d'une fille qui reçut le nom de Garmi, et que son grand-père, le chef bafour, resté sans enfants, maria par la suite à un de ses principaux lieu- tenants. Telle aurait été l'origine des princes ouolofs (Bourba du Diolof et damel du Cayor). C'est dans la lignée de cette princesse Garmi, et toujours par la voie utérine, que furent choisis les chefs du peuple bafour transformé.
Si la plus grande partie du peuple bafour dut céder la place aux Lemtouna, certaines fractions restèrent dans le desert et payèrent tribut aux vainqueurs. On verra plus loin que, au témoignage d'Ibn Khaldoun, plusieurs peuplades noires se soumirent aux Çanhadja et leur payèrent l'impôt de capitation, ou bien même acceptèrent leur domination morale et s'islamisèrent à leur contact.
Plusieurs lettrés maures affirment que ces Bafour asservis sont les actuelles fractions Zenega : Id Rarla et Lemradinc, tributaires des émirs Trarzas. Il est plus vraisemblable que ces Bafour primitifs n'ont pas seuls donné naissance aux fractions précitées, mais qu'ils ont contribué, par fusion avec des éléments maures, à les former au cours des siècles. PAUL MARTY

Source: Diaahmedou Dia via facebook

Mardi 10 Février 2015
Boolumbal Boolumbal
Lu 2589 fois



Recherche


Inscription à la newsletter