Les médiateurs dépêchés par la communauté internationale en Mauritanie ne sont pas parvenus à faire asseoir les protagonistes de la crise (le général Ould Abdel Aziz, le RFD et le FNDD) autour d’une même table de négociations (malgré une première rencontre à huis clos entre des delegués), et ce, après une semaine de médiation. Les médiateurs ont quitté la Mauritanie le 22 mai après avoir annoncé que leur médiation se poursuivra.
Aucune solution consensuelle sur les enjeux majeurs de la crise consecutive au putsch du 6 aout : le report (ou l’annulation de l’agenda électoral (initié par la junte et ses soutiens), la libération des détenus politiques (libérés par la Cour Suprême et maintenus en détention), le gouvernement de transition et le réaménagement de la commission électorale, ne s’est dégagé jusqu’à présent. Des rumeurs persistantes ont circulé sur des avancées, notamment, sur le report de la présidentielle jusqu’au 15 juillet, mais n’ont pas été confirmées.
Le report de la présidentielle, l’association de la mouvance anti-putsch à un gouvernement de transition et le réaménagement de la Commission Electorale figureraient parmi les propositions faites le 20 mai, par les médiateurs internationaux aux protagonistes de la crise mauritanienne.
Les médiateurs ont rencontré le 21 mai toutes les parties et ont ensuite tenu une réunion avec les ambassadeurs occidentaux à Nouakchott (France, Allemagne, Espagne, Union Européenne et Etats-Unis) pour leur exposer le résultat de leur médiation.
Au milieu de la journée du 21 mai le Haut conseil d’Etat (HCE, junte militaire restée au pouvoir malgré la démission de son président) a tenu une réunion de «politico-sécuritaire» dit-on, et invité les mauritaniens à faire preuve de "civisme et de responsabilité" mettant en garde contre "toute action tendant à troubler l’ordre public ou à porter préjudice à la sécurité des personnes ou de leurs biens".
Le HCE a souligné aussi qu’il comptait sur "le sens élevé de patriotisme des différents acteurs politiques, engagés ou non dans cette campagne, pour que le climat de tolérance et d’apaisement, cher au mouvement de rectification soit préservé au mieux des intérêts supérieurs de la nation".
Le général Ould Abdel Aziz candidat à la présidentielle avec trois autres candidats (non identifiés comme protagonistes de la crise), auraient rejeté le report de la date du scrutin du 6 juin en l’absence d’une solution consensuelle, tandis que la mouvance anti-putsch : la coalition RFD-FNDD exigeait un engagement clair annonçant ce report, ainsi que la libération des détenus politiques, comme geste d’apaisement et volonté d’entamer le dialogue.
Dans l’après- midi du 21 mai le général Ould Abdel Aziz est parti à Kiffa, capitale de l’Assaba (600 kms à l’est de Nouakchott) pour l’ouverture officielle de sa campagne électorale qu’il avait décalé de 24 heures «pour donner une chance à la médiation». De Kiffa, il se rendra le 22 mai dans les deux régions des Hodhs.
La mouvance nationale anti-putsch a organisé en début de soirée du 21 mai, une conférence de presse dans laquelle, elle a fait porter la responsabilité de l’échec de la médiation internationale à «l’entêtement» du général Ould Abdel Aziz et annoncé l’organisation de manifestations pacifiques, pour exprimer son opposition à l’agenda électoral de la junte et ses soutiens.
"Nous ne saurions accepter de mener des négociations sous la menace d’une campagne, ce serait un chantage, un forcing pour nous imposer un agenda que nous refusons et considérons comme illégal", a indiqué dans cette conférence de presse Ahmed Ould Daddah, chef de file institutionnel de l’opposition démocratique mauritanienne.
Le général Ould Abdel Aziz, a réagi en fin de soirée du vendredi 21 mai en accusant l’opposition anti-putsch de «bloquer» la démocratie. "Ce sont eux qui bloquent la démocratie, nous sommes prêts à négocier alors qu’ eux ne le sont pas", a-t-il déclaré lors de son premier discours de campagne prononcé à Kiffa. Le général candidat a encore une fois accusé ses opposants de "chercher à imposer un embargo contre leur pays et à oeuvrer pour l’affamer", estimant qu’ils ne "représentent rien " et qu’ils ne sont qu’une «minorité constituée de symboles de la gabegie».
Wade et la France s’y mettent encore !
A la veille de son départ le 22 mai de la Mauritanie, M. Ramdane Lamamra le commissaire de l’Union africaine chargé de la paix et de la sécurité a voulu maintenir l’espoir en indiquant -dans une déclaration à la presse- que la poursuite de la campagne électorale ne veut pas dire que la fin de la médiation internationale. M. Lamamra a rendu -dans le jargon diplomatique- un hommage appuyé aux protagonistes de la crise mauritanienne (le président renversé Sidi, le général Aziz et les leaders du RFD et du FNDD) pour leur contribution à ce stade de la médiation et indiqué que le président Abdoulaye Wade entreprendra de nouveau des contacts à partir du 22 mai avec les protagonistes.
La France a également apporté (toujours, le 22 mai) son soutien à la médiation internationale conduite par le Sénégal et espéré la conclusion d’un accord sur l’élection présidentielle.
"Nous saluons les démarches entreprises par le Sénégal ainsi que par les représentants de l’Union africaine et des Nations unies en vue de parvenir à une sortie de crise en Mauritanie", a déclaré le porte-parole adjoint du ministère français des Affaires étrangères, Frédéric Desagneaux.
"Nous avons rappelé à plusieurs reprises, avec nos partenaires du groupe de contact international, notre souhait que le processus électoral se déroule de manière transparente et régulière, dans des conditions qui permettent à toutes les forces politiques représentatives d’y participer et d’assumer leurs responsabilités", a-t-il ajouté.
Qui sont-elles ces forces reprensentatives dont la France souhaite la participation ? Et à quel processus électoral ? Frédéric Desagneaux n’a pas apporté de précisions là-dessus.
Source: Tahalil