Pour les parents de Ould Taya, tout est encore permis



Pour les parents de Ould Taya, tout est encore permis
Dans le cadre de sa perpétuelle bataille contre le chômage parmi les jeunes de sa tribu, l'ancien dictateur Maaouiya Ould Taya avait fait en sorte que le très prisé concours des inspecteurs de police soit ouvert à tous les postulants, y compris les non-bacheliers. C'est ainsi que son beau-frère Sevir Ould Ahmed Tolba et ses cousins Hadrami Ould Berrou et Mohamed Lemine Ould Abdellahi furent admis.

Sevir, fort de son appartenance à la famille de Aïcha Mint Ahmed Tolba l'épouse de Ould Taya, a entamé sa carrière en ciblant deux leaders de l'opposition, lors de la répression d'une manifestation pacifique, à Nouadhibou en 2000. Il avait sciemment molesté les avocats Mohamed Mahmoud Ould Emmat et Yedali Ould Cheikh.

Quant à Ould Berrou, les Saoudiens l'ont refoulé, l’année dernière, de l’école des commissaires, pour insuffisance de niveau.

Mohamed Lemine Ould Abdellahi, neveu du milliardaire Mohamed Abdellahi Ould Abdellahi (dit Chriv, du groupe d’affaires éponyme MAOA) est le héros de notre histoire. Le 5 octobre 2009, il roulait à tombeau ouvert. Comme à son habitude, il dédaignait les feux rouges et tant pis pour les autres automobilistes ! Ils devaient s'adapte à sa conduite. Lorsqu'il passe à proximité d'un croisement important, les policiers bloquent la circulation pour lui libérer un passage, privilège dont ne bénéficient, aujourd’hui, ni les ministres ni les hauts officiers du commandement militaire.

Alors qu'il arrive à la hauteur du carrefour Bana-Blanc, il accélère, confiant en la présence d'un policier mais, sur sa gauche une voiture déboule et le surprend. Il freine brusquement et manque alors d’emboutir le véhicule. Deux policiers accourent ; l'un d'eux se confond en excuse "je m'étais absenté deux minutes pour..." mais l'inspecteur l’interrompt, sec. Avant de redémarrer en trombe, il désigne, du doigt, l’automobiliste coupable de crime de lèse-majesté et ordonne à l’agent : "met-le au frais" !

Taqadoumy a joint l’outrecuidante personne qui osa passer devant le puissant inspecteur. Il raconte :

"Je conduisais mon véhicule allant à une réunion importante, il était 9h50 quand je suis arrivé au rond-point dit de Bana-Blanc. Le feu passe au rouge, je m'arrête. Quand il passe au vert j'avance lentement et heureusement d’ailleurs : sur ma droite, déboulait une Toyota Carina dont le chauffeur, apparemment pressé, n’avait pas respecté le feu rouge. J'ai manœuvré et réussi à l'éviter de justesse, d’un coup de frein. Il s’est alors arrêté juste en face et nous bloqua le passage, à moi et aux autres automobilistes derrière".

Mon premier réflexe consista à risquer un coup de klaxon mais je n’aurais pas dû car, aussitôt, deux policiers ont accouru vers lui et échangé de courtes phrases avant de lui ouvrir un passage. Une fois parti, ils se précipitent vers moi et me demandent de me ranger sur le bas-côté. L'un d'eux me dit tout de go : "mon pauvre, tu es dans une très mauvaise posture, le Monsieur qui vient de partir est l’inspecteur Ould Abdellahi et toi tu n’es personne".

Je réponds que cela ne lui donnait pas le droit d’abuser de sa position. C’était une mauvaise réponse car le policier - un certain brigadier Abderrahmane - m’insulta copieusement et me traita de petite personne gonflée de m... .Tout mon arbre généalogique passa à la moulinette de l’injure, par mon détracteur, manifestement en verve.

Puis on m'emmena, manu militari, vers le commissariat de la voie publique, pour passer d’abord devant un autre sous-officier. Je tente de donner mon point de vue mais il m'intime de là boucler avant de m’envoyer devant un adjudant ; ce dernier m’écoute calmement avant de me conseiller, à l'avenir, d'éviter de me confronter aux "hommes de loi" (sic).

Il dit appliquer l’ordre de me "mettre au frais" ; la personne que j’ai "dérangée" était Monsieur Mohamed Lemine Ould Khalil Ould Abdellahi, inspecteur de police, commandant de la compagnie de Nouadhibou. L’adjudant conclut sa leçon par un aveu : "fiston, ce type est puissant et moi je n’y peux rien". Il m’envoya ensuite devant un inspecteur.

Ce dernier voulut me convaincre d’avoir commis une grave infraction, qualifiant celle-ci de "tapage diurne" (sic). Je réponds que brûler le feu me paraissait encore plus grave car, contrairement au tapage diurne, il met en danger la vie d'autrui ; d’ailleurs, même en admettant une infraction par l’usage du klaxon à moi imputé, je ne méritais toujours pas un tel traitement. Il rétorque : "Je crois que l’on va te garder jusqu’à ce que tu comprennes la gravité de ton acte".

C’est alors que l’agent de police - Mohamed - alors en faction avec le brigadier Abderrahmane au Bana-Blanc, est intervenu pour déplorer un abus de pouvoir ; selon lui, j’avais raison dans tout mon propos. L’on me transféra alors au commissaire de la brigade routière lequel, après la version du policier Abderrahmane, m’a demandé de rentrer chez moi.

Il était 14h et j’étais exténué, j’avais raté ma réunion de travail et toute ma journée avec, parce que j’ai eu la malchance de me trouver, quatre années après la chute de la dictature, sur le chemin d’un inspecteur, fils de la puissante famille Abdellahi.

En racontant cette histoire à un ami, il me dit, philosophe : "Tu as eu beaucoup de chance". Je ne relève pas l'ironie du propos et le laisse continuer : "Estime-toi heureux d'être né maure blanc et de ne subir cette mésaventure qu’après le départ de Ould Taya".

Il n'avait raison qu'à moitié : si la chute du dictateur a fait perdre, à sa tribu, une partie de son énorme influence, cette aura demeure intacte dans la police car elle se fonde, toujours, sur la parenté avec le Général Mohamed Ould Cheikh Ould Hadi, le tout puissant directeur Général de la Sûreté Nationale (DGSN) et autre cousin de Ould Taya".


Source: Taqadoumy

Lundi 19 Octobre 2009
Boolumbal Boolumbal
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