Primes de logement et de Transport Grogne à la Santé et à l'Education



Primes de logement et de Transport Grogne à la Santé et à l'Education
Les premières indiscrétions sur les futures indemnités de transport et de logement risquent de confronter le gouvernement de Moulay Ould Mohamed Laghdaf à un malaise social profond, avant même le début d'application de ces deux mesures prévue en février, pour la première et en juillet, pour la seconde.
Il a suffi que le " projet " de fixation des primes de transport tombe entre les mains de certains professeurs pour que la grogne gagne certains établissements de Nouakchott où le mot " grève " est déjà dans la bouche de plusieurs enseignants qui ne veulent même pas attendre l'effectivité de cette mesure pour faire entendre leurs protestations. Même son de cloche chez les médecins dentistes mauritaniens dont le doyen, Dr Mohamed El Moustapha Ould Brahim, a rendu publique une déclaration dans laquelle il qualifie " d'insignifiants " les montants alloués aux primes de logement et de transport, par décret du gouvernement.

En fait, cette histoire de primes de logement et de transport repose, avec plus d'acuité, la question de tout ce qui se fait, en vase clos, par les bureaucrates pour être servi " en prêt à consommer " à des dizaines de fonctionnaires et agents de l'Etat considérés comme de simples bidasses qui n'ont pas leur mot à dire dans toutes réformes à entreprendre. C'est à croire que ceux qui confectionnent les textes, qui fixent les avantages, en espèce ou en nature, en un mot qui pensent la politique économique et sociale de l'Etat, ne pensent d'abord qu'à eux-mêmes.

Avoir décidé de la généralisation des primes de transport et de logement est certes une bonne chose puisqu'on met fin à une injustice qui date d'un demi siècle mais faudrait-il que l'Etat puisse prendre en compte TOUS les paramètres qui servent à fixer les taux de la cagnotte à partager. Comment comprendre alors, s'il n'y a pas une volonté délibérée de saboter la décision présidentielle d'augmenter les salaires de la sorte, que dans le cadre de la prime de transport, un médecin ou un professeur puisse être inscrit dans la fourche de 3000 à 5000 UM, lui qui est appelé à se déplacer plus que toutes les autres catégories administratives ? Est-ce à croire qu'après la catégorie des plantons et autres gardiens, à qui l'on attribuerait, en toute logique, le bas de l'échelle dans la prime de transport, même si là encore, il y a des choses à redire, l'enseignant et le médecin - bardés de diplômes - manquent de considération en si haut lieu ?

Au niveau du secteur de l'enseignement, l'injustice est flagrante : alors qu'un inspecteur du Secondaire devrait bénéficier d'une prime de transport de 45.000 UM, son collègue du Fondamental gagnera moins de la moitié (20.000 UM) au moment où les " soldats " (professeurs et instituteurs) oscillent entre 4000 et 5000 ouguiyas ! Les " têtes pensantes " à l'origine de ce partage très inégal l'expliqueraient par le fait que les inspecteurs sont appelés à parcourir, à longueur de journée, les établissements scolaires alors que la classe laborieuse ne se déplace que deux fois dans la journée !

Au niveau du secteur de la santé, la réplique est la même : le transport ne coûte au Trésor public que des miettes (de 3160 UM à 4040 UM).


Primes de logement

Fixées par arrêté, les indemnités de logement varient entre 7000 UM et 54000 UM alors que les primes de transport oscillent entre 3000 ouguiyas et 55.000 UM. Pour cela, l'enveloppe globale passe de 8.000.000.000 UM/an, pour la prise en charge du logement, de l'essence, l'entretien des voitures de l'Etat, d'eau et d'électricité, à 10.000.000.000 d'ouguiyas. Pour la prime de transport, déjà connue, le différentiel est on ne peut plus flagrant entre ceux qui sont au sommet de la pyramide, souvent sans diplômes et sans compétences avérées, et ceux sur qui repose l'essentiel du travail. Ainsi, les conseillers de la Haute Cour de Justice, les membres de l'IGE et le Directeur adjoint du Protocole présidentiel traînent dans leur sillage les présidents des chambres près de la Cour suprême, les chargés de mission et conseillers des ministères, ainsi que les inspecteurs généraux desdits départements. Ce premier groupe de nantis gagne le jackpot, de part la responsabilité et l'estime que lui confère sa charge (55.000 UM). Il est suivi de près par un second groupe qui profitera d'une prime de transport de 45.000 UM (conseiller près de la cour d'appel, présidents des tribunaux de moughataa, directeurs centraux, directeurs régionaux, contrôleurs à l'inspection générale des Finances, inspecteurs de l'administrations, inspecteurs de l'enseignement secondaire, directeurs des établissements publics à caractères administratif). La troisième vague qui tire son épingle du jeu s'en sort avec une indemnité de 35.000 UM (wali mouçaid, premiers conseillers d'ambassades, directeurs adjoints, directeurs régionaux, directeurs des ENI, directeurs de lycées, chefs de service dans une administration centrale). Les chefs d'arrondissements, consuls généraux de première classe ou de seconde classe, deuxième conseiller d'ambassade et autres directeurs de collèges bénéficient d'une indemnité de 20.000 UM. L'avant dernière catégorie de cet étrange classement (20.000 UM) est occupée par les directeurs des études, les chefs de divisions et les directeurs des études des ENI. Enfin ceux qui supportent le poids de cet édifice qu'on appelle " l'Etat " (on ne peut pas les citer, tant ils sont nombreux) ne gagneront que les miettes (entre 3000 et 5000 ouguiyas).


Reprendre d'une main…


La nouvelle donne ne profite, apparemment, qu'aux " riches ", ceux qui avaient par le passé tous les avantages. Ils ont tout simplement trouvé un moyen ingénieux pour ne pas perdre les privilèges qu'ils s'étaient octroyés, en jouant sur la fibre de la " généralisation " du logement et du transport. Mais l'on oublie qu'en casant les secteurs sociaux les plus sensibles (santé et éducation) au bas de l'échelle, on ne fait que mal servir les réformes que le président Mohamed Ould Abdel Aziz veut mettre en œuvre. Comment voudrait-on, en effet, empêcher professeurs et enseignants de vouloir arrondir leurs difficiles fins de mois, s'ils ne sont pas mis dans de bonnes conditions ? Comment veut-on surtout, les " contenir ", les encourager à aller travailler à l'intérieur du pays si les avantages sont réservés à ceux qui se prélassent, à longueur de journée, dans les bureaux de Nouakchott et des capitales régionales ?

Ainsi, l'augmentation de salaires de Ould Abdel Aziz risque de prendre une tournure imprévue à cause de son dévoiement par ceux chargés de son étude et de sa répartition équitable. Car il s'agit bien d'une aberration. Si l'on est prêt d'accepter que tout le monde se déplace, alors l'injustice est flagrante, entre une dotation de 55.000 UM et une aumône de 3000 UM. On ne s'en sort pas également quand on considère la question du point de vue des diplômes et des responsabilités : Comment justifier que la différence de prime entre un professeur du Second cycle et le gardien ou le planton du lycée dans lequel il enseigne ne soit que de 1500 UM ?


Disproportions

En fait, comparativement aux augmentations précédentes (celles de Taya et de Ely), Ould Abdel Aziz risque de faire les frais des mauvais " calculs " de ceux qui ont été chargés de l'élaboration de ces primes. Le colonel Ely Ould Mohamed Vall aura toujours la côte auprès des fonctionnaires et agents de l'Etat qui ont vu leurs salaires passés du simple au double. On ne pourra pas mettre en avant ici le caractère général de la nouvelle mesure puisque, en terme de gains, la différence est grande. D'autant que les travailleurs du secteur de la santé et de l'éducation ne savent pas encore si les nouvelles primes vont mettre fin à celles (éloignement) qu'ils avaient déjà et qui est de loin plus importante.

Reste un autre aspect qui peut bien jouer un mauvais tour au pouvoir actuel : la propension des commerçants à suivre toute augmentation - ou même à la précéder - en " alignant " les prix sur la hausse des salaires. Pour une ouguiya de gagner, le pauvre travailleur devra en perdre deux à trois. Tout va monter en flèche : essence, riz, sucre, pâtes, légumes, tout, sauf peut-être, l'aura d'un gouvernement qui rate tout ce qu'il entreprend, depuis qu'il a été formé. Dommage pour la politique volontariste du " président des pauvres " !


Source: L'authentique

Vendredi 22 Janvier 2010
Boolumbal Boolumbal
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